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Il a l’œil pétillant de ceux qui pensent qu’on peut changer le monde. Perrick Penet-Avez dirige No Parking, société de prestations informatiques à Euratechnologies Lille. Il est aussi l’initiateur régional de Nouvelle Donne, mouvement initié par l’économiste Pierre Larrouturou. Un parti hors des partis pour qui un autre progrès social est possible. Un patron « éclectique et sans bling-bling » pour qui la finance est bien l’ennemie.

Voir quotidiennement la misère frapper à sa porte, mais aussi côtoyer l’élite du monde. Cela forge l’esprit. Et permet de comprendre très vite que tout ne tourne pas toujours très rond ici-bas.

Perrick Penet-Avez a vécu ce paradoxe, « entre deux mondes ». Perrick est en effet le fils du directeur régional lillois d’ATD Quart-Monde, nommé en 1991 directeur pour l’Angleterre du mouvement international de lutte conte la pauvreté. « J’ai baigné toute ma jeunesse dans l’engagement associatif et militant. Je me suis brusquement retrouvé au lycée français de Londres avec une certaine élite politique et économique, fils d’ambassadeurs et de grands patrons. Le choc fut autant social que culturel. »

« Ce pour quoi nous étions programmés. »

Une élite que Perrick continue de côtoyer quelques années plus tard au sein du prestigieux Imperial College où il passe une maîtrise de mathématiques. « J’aurais pu devenir banquier ou trader, ce pour quoi nous étions tous programmés. » Mais, en cette fin des années 1990, cet esprit matheux et libre voit déjà l’aberration de la financiarisation de l’économie, des valorisations abusives de sociétés sans raisons autre que la spéculation pure.

Il préfère retourner à l’économie réelle, à Lille, pour s’occuper du service informatique d’une agence de communication. Tout en étant permanent à mi-temps à l’aumônerie du lycée Faidherbe. Un engagement humaniste et chrétien logique pour cet esprit indépendant.

Une indépendance qui le mène tout droit à l’entrepreneuriat. En mars 2004, Perrick Penet-Avez crée No Parking, société de services, pour qui l’informatique doit « être en mouvement, ne pas se ranger ». Parce qu’il a besoin d’un logiciel de gestion du temps, Perrick Penet invente Opentime. « Au départ ce logiciel ne devait même pas être diffusé. » Il est aujourd’hui le produit vedette de son entreprise, avec qui il réalise 80 % de son chiffre d’affaires, auprès des plus grandes sociétés de la distribution et de l’industrie.

« En tant que petit patron, avec trois salariés, je vis complètement déconnecté de la titrisation, de la spéculation, de l’appropriation de la dette. Et je suis très attristé devant la financiarisation du monde. J’ai vu comment une génération brillante est partie la bouche en cœur, à partir des années 1980 avec l’ultralibéralisation du monde, dans des mécanismes aberrants. » Qui aboutissent en 2008 à la chute de Lehman-Brothers, et à une crise dont on ne se relève toujours pas. La finance était paraît-il l’ennemie, qu’est-ce qui a changé pour autant ?« Les cartes politiques en France sont vieilles, usées. » Entre des partis classiques devenus caricaturaux, et des extrêmes inacceptables, Perrick Penet fait partie de cette génération de patrons qui choisissent de s’engager dans les mouvements citoyens. Le collectif Roosevelt, le mouvement Anticor (anticorruption), et tout récemment Nouvelle Donne, créée par l’économiste Pierre Larrouturou, dont Perrick Penet-Avez est l’initiateur en région.

« Ce n’est pas la croyance éperdue en la croissance qui nous sortira de la crise. Il faut trouver d’autres leviers, d’autres formes de progrès social que l’imprécation en cette croissance qui crée des bulles financières, pollue la planète, et n’est qu’une réflexion à court terme. » Perrick Penet croit aussi en une autre forme de gouvernance de la zone euro, plus démocratique. « Une opportunité à saisir »… avant qu’il ne soit trop tard.