Le peuple britannique s’est exprimé démocratiquement jeudi 23 juin 2016, et a décidé de sortir de l’Union européenne après 43 ans de cohabitation parfois difficile. Il avait fallu une crise économique et la mort du général de Gaulle, opposant de toujours à l’adhésion britannique, pour que le Royaume Uni nous rejoigne au sein de l’Union. Les crises récentes, d’abord financière, puis économique et migratoire, les lacunes de la gouvernance européenne, et les dérapages populistes de nombreux politiciens d’outre-Manche ont eu raison de la volonté de rester dans l’Union européenne d’un très grand nombre de citoyens britanniques.

La situation apparaît extrêmement complexe. En premier lieu, le résultat du référendum britannique n’a aucune valeur juridique même si David Cameron s’est engagé à le respecter, tout en laissant le soin à son successeur d’enclencher l’article 50 du Traité de Lisbonne à une date encore indéterminée. De surcroît, cette décision devra être approuvée par le parlement britannique qui est majoritairement anti-brexit, ce qui pourrait entraîner une dissolution avec de nouvelles élections. En cas de revirement de l’opinion – alors que certains électeurs semblent regretter leur choix, n’ayant pas anticipé toutes ses conséquences et cru certains mensonges – une majorité de députés « remain » pourrait être reconduite et susciter un nouveau référendum. Enfin, le processus d’une sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne prendra plusieurs années, alors que la France et Bruxelles souhaitent « divorcer » rapidement mais que l’Allemagne temporise déjà.

Les difficultés d’une sortie de l’Union européenne paraissent, en effet, nombreuses et graves, en particulier pour le Royaume-Uni : difficultés financières, certainement ; inquiétudes des expatriés britanniques en Europe et des résidents européens au Royaume-Uni ; risque de séparation de l’Ecosse qui a voté à 62 % pour le maintien au sein de l’UE ; relance du débat sur le rattachement de l’Irlande du Nord à la République d’Irlande; colère des jeunes britanniques qui ont aux 2/3 voté pour le maintien au sein de l’UE.

La dissolution du Royaume aurait des conséquences encore imprévisibles. L’Union européenne pourrait faire un bon accueil à l’Ecosse, si elle veut nous rejoindre, et la France se montrer ouverte aux jeunes citoyens britanniques déçus qui souhaiteraient trouver refuge dans notre pays et rejoindre les 400 000 expatriés britanniques en France. Néanmoins, nous avons tout à craindre d’une instabilité chez nos voisins et des risques de crispation en Irlande du Nord.

Mais le plus important est de tirer les leçons de ce referendum. Le Royaume-Uni a toujours poussé pour que l’Union européenne se limite à un marché commun libéral, avec un début d’alliance militaire, alors que les fondateurs de l’Union européenne rêvaient d’une Europe politiquement unie. Depuis la fameuse phrase de Margaret Thatcher (« I want my money back »), il était devenu clair que la notion de solidarité au sein de l’Union, entre pays riches et plus pauvres, ne correspondait pas aux conceptions britanniques. Le départ du Royaume-Uni offre une occasion unique de tout remettre à plat et de s’interroger sur les objectifs et moyens d’une Union européenne démocratique, solidaire, sociale, écologique, à l’opposé du dogme du libéralisme sauvage anglo-saxon.

Depuis sa création, et le succès des 550 000 voix obtenues aux élections européennes de 2014, Nouvelle Donne souhaite une Europe plus intégrée et efficace, en renforçant les pouvoirs du Parlement européen au détriment de ceux du Conseil qui réunit les chefs d’Etat et de gouvernement ; la fin du pacte de stabilité qui n’a apporté qu’austérité,  précarité et chômage ; un traité de l’Europe sociale ; une politique européenne étrangère et de défense ; et une clarification des relations entre l’Union européenne et ses Etats membres sur la base des principes de subsidiarité pour une réforme des institutions claire et facile à comprendre pour les citoyens européens, à la place  de traités longs, fumeux et incompréhensibles.

Cela suppose que nos dirigeants soient à la hauteur de l’enjeu, capables de trancher rapidement sans jamais perdre de vue l’objectif. Cela suppose aussi que cette évolution se concrétise, dans un premier temps, avec des pays volontaires qui acceptent d’évoluer vers une convergence politique rapide, convergence fiscale, convergence sociale, convergence « démocratique » en permettant aux citoyens européens de « reprendre la main » sur leur avenir commun pour en finir avec l’Europe de la concurrence entre les Etats et pour enfin bâtir un vrai espace commun.

Créeons donc une zone d’action à quelques pays partageant les mêmes objectifs démocratiques, sociaux et écologiques !

Parce qu’il est devenu presque impossible de progresser efficacement à 28 pays hétérogènes, avec des niveaux d’intégration et des objectifs économiques, sociaux et politiques différents, Nouvelle Donne propose de créer une zone resserrée autour d’un premier pôle d’une dizaine de pays volontaires, afin de mettre en oeuvre les solutions que les citoyens attendent.

Il est donc temps de passer, en Europe, d’une logique de concurrence exacerbée stérile à une logique de coopération renforcée constructive. Quelques pays ont réussi à le faire avec Airbus,  il faut maintenant aller plus loin sur les questions essentielles pour notre avenir : renforcement de la défense et de la sécurité, gestion digne et coordonnée de l’immigration, “écologisation” de notre mode de développement, assainissement du système financier et régulation de la mondialisation commerciale.

Les conditions d’accès à cette avant-garde volontaire:

  1. Ne pas être un paradis fiscal
  2. Etre membre de la zone Euro
  3. Etre engagé dans la coopération renforcée pour la Taxation sur les Transactions Financières
  4. S’engager sur l’adoption d’un Traité de convergence sociale
  5. Accepter que les ressources de l’Europe ne reposent plus uniquement sur les citoyens (créer un impôt européen sur les bénéfices non réinvestis des entreprises)

Le fonctionnement de cette zone d’action:

Des délégués des parlementaires nationaux et des délégués des députés européens des pays de ce groupe siègeront au sein du parlement de la zone d’action, basé à Strasbourg.

Actuellement toutes les grandes décisions sont prises par le Conseil des Chefs d’Etat et de gouvernement. Cette règle met à mal la démocratie et laisse une large place aux technocrates et aux lobbys.

La solution ? Elaguer les compétences) en respectant le principe de subsidiarité  et mettre en place un régime parlementaire. Le lieu du pouvoir doit être le parlement d’où procédera le gouvernement de la zone daction. Il reviendra aux citoyens de cette zone d’action de choisir, une fois tous les cinq  ans, quelle politique ils souhaitent et quelle équipe gouvernementale européenne pour la porter.

Etre prêts à établir un rapport de force

Tout comme Margaret Thatcher et les libéraux ont réussi en deux ans à changer le cours de l’Europe avec leur révolution néo-libérale au début des années 80, il est possible, en deux ans, de faire aboutir une contre-révolution progressiste.

Ce groupe restreint de pays volontaires fera adopter un Traité social européen de convergence par le haut, mettra en oeuvre une taxe élargie sur les transactions financières et un impôt sur les bénéfices non réinvestis des entreprises, sous peine de suspendre le paiement de sa part du budget européen et de pratiquer la politique de la chaise vide.

Nouvelle Donne, au pouvoir, donnera deux ans à l’Union européenne pour parvenir à cette Zone d’Action aux grandes ambitions démocratiques, sociales et écologiques, sous peine, au terme de ce délai, de suspendre la contribution annuelle de la France au budget européen et de pratiquer la chaise vide.