Justice

Pilier de notre démocratie, la Justice est à ce jour, fortement fragilisée. Elle ne joue plus correctement son rôle de régulateur social. En cause : une indépendance insuffisante par rapport au pouvoir politique et des ressources matérielles et humaines inadaptées aux besoins des justiciables

Le droit est avant tout un moyen d’organisation de la société avec un ensemble de règles et de normes dont la finalité est d’organiser les rapports sociaux individuels et collectifs. Il s’impose à tous et ses manquements sont sanctionnés dans le strict respect du principe du contradictoire, auquel en matière pénale s’ajoute celui du respect de la présomption d’innocence.

La séparation des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire garantie par la Constitution est ainsi un solide rempart contre “l’arbitraire” et le “fait du prince”.

Vivant, le droit se doit de s’adapter aux évolutions sociétales sur la base de lois générales et impersonnelles adoptées par le pouvoir législatif (Assemblée Nationale et Sénat). Il revient donc au pouvoir judiciaire de garantir nos libertés individuelles et publiques en veillant à l’application juste et impartiale du droit pour chaque citoyen

La Justice constitue donc un fondement essentiel de notre système démocratique.

Elaborer une politique de Justice ne se limite pas seulement au seul champ du droit pénal et de l’application des peines privatives de liberté. En réalité sont concernés tous les champs de notre vie quotidienne (famille, enfance, tutelle, travail, logement, contrats commerciaux, relations avec l’Administration, etc).

Face à tous ces enjeux, la Justice doit être érigée en vraie priorité nationale. Or tel n’est pas le cas aujourd’hui. 

Travaux de la Commission thématique nationale Services Publics – groupe de travail “Justice” – 6 février 2022

 

Repenser et refonder l'organisation de la justice

L’indépendance de la justice est un pilier de notre démocratie. Il convient de repenser son organisation afin de garantir son indépendance de toute pression politique dans l’intérêt de tous les justiciables.

  • Garantir l’Indépendance des magistrats du Parquet. En charge de l’initiative des poursuites pénales, les magistrats du Parquet doivent être totalement indépendants du pouvoir politique : il faut couper tout lien avec le Ministre de la Justice en confiant leur nomination au Conseil Supérieur de la Magistrature.
  • Supprimer tout lien hiérarchique entre les procureurs de la République et le ministère de la Justice et supprimer les remontées d’informations sur les affaires politico-financières. [proposition Anticor]
  • Créer une vraie Cour constitutionnelle composée d’éminents juristes nommés pour neuf ans non renouvelables, par la Cour de cassation, le Conseil d’État et la Cour des comptes, sur avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature, en remplacement de l’actuel conseil constitutionnel. Les anciens présidents de la République n’en seront plus membres de droit. [proposition Anticor]
  • Supprimer la Cour de Justice de la République et soumettre les membres du Gouvernement aux tribunaux de droit commun, en application du principe selon lequel tous les citoyens sont égaux devant la loi. [proposition Anticor]
  • Consacrer l’existence d’un pouvoir judiciaire par la fusion des deux ordres de juridiction : l’ordre administratif et l’ordre judiciaire, afin de renforcer la prééminence du droit dans notre démocratie. Cette fusion permettra la réunion des magistrats en un corps unique. Les nominations et avancements de carrière seront assurés par le Conseil Supérieur de la Magistrature. La formation sera assurée par l’École Nationale de la Magistrature sur la base d’enseignements de spécialité. Ainsi le Conseil d’État sera recentré sur sa mission historique de Conseil du Gouvernement.
  • Refondre la carte des Cours d’Appel. Réviser la carte des Cours d’Appel dont le périmètre géographique distinct de tous les échelons territoriaux ne permet plus une collaboration efficace avec les autres services déconcentrés de l’État et des collectivités territoriales, est une nécessité. Il s’agit de fluidifier le travail de l’ensemble de la chaîne de Justice.

  • Supprimer les Cours criminelles départementales sans jurés populaires. Créées pour désengorger les Cours d’Assises, ces Cours criminelles départementales réduisent la place du citoyen dans la Justice pénale, alors que la Justice est rendue au nom du peuple français. Il s’agit donc de replacer le citoyen au cœur de la justice criminelle.

  • Développer le recours aux modes alternatifs de règlement des litiges. Ces médiations, conciliations, arbitrages, dont la mission est dévolue à des professionnels qualifiés s’exerce sous le contrôle du Juge qui en dernier ressort  dira le droit. Un des objectifs recherché est l’acceptation meilleure de la sentence par les parties qui élaborent conjointement la solution au litige mais aussi de recentrer les Juges sur leur mission première qui consiste à “dire le droit”.

Renforcer l'accès aux droits et mieux prendre en charge les victimes d'infractions

Mieux accompagner les victimes d’infractions est une nécessité. Le numérique ne peut remplacer l’accompagnement par des personnels qualifiés, qui doit être assuré dans chaque tribunal, de la prise en charge jusqu’au règlement du litige.

Nouvelle Donne préconise de :

  • Faciliter le recours à l’Aide Juridictionnelle et assurer une juste rémunération aux avocats. Actuellement, un tiers des avocats percevraient des revenus inférieurs au SMIC et nombre d’ avocats spécialistes ne veulent pas travailler aux tarifs de l’Aide Juridictionnelle. À l’instar de ce qui se passe dans d’autres pays, la création de structures dédiées qui seraient rattachées aux barreaux et se verraient attribuer toutes les missions d’Aides Juridictionnelles est une réponse appropriée. Les avocats seraient conventionnés avec celles-ci et percevraient une rétribution forfaitaire mensuelle. Cela permettrait de revaloriser le travail et la qualité des services dans le cadre de l’Aide juridictionnelle tout en assurant un juste recours aux droits.

  • Créer une cellule dédiée d’assistance aux victimes dans chaque tribunal. L’objectif est de renforcer l’assistance aux victimes et de mieux les accompagner. Placée auprès de chaque Président de Juridiction, elle aura pour mission d’aider dans l’accomplissement des démarches et la reconnaissance de leur qualité de victime en lien avec les associations spécialisées déjà existantes.

Recruter des magistrats et des personnels de justice

Même si les moyens alloués au Ministère de la Justice ont augmenté de 22 % en 10 ans, ils ne permettent pas de répondre correctement aux besoins : la justice française est le parent pauvre des politiques publiques. La France est en retard par rapport à ses partenaires européens en nombre de juges comme de budgets. La moyenne européenne est de 21 juges pour 100 000 habitants contre 13 en France (à nuancer si on tient compte des magistrats non professionnels des juridictions commerciales et prud’hommales, mais on reste loin du compte). Le nombre de magistrats s‘élève à environ 9 100 et celui des fonctionnaires de justice à 26 000 au 1er janvier 2021. Les dépenses par habitant sont plus basses que la moyenne européenne : l’étude 2020 de la Commission Européenne Pour l’Efficacité de la Justice (CEPEJ) du Conseil de l’Europe, montre que la France a consacré, en 2018, 69,5 € par habitant et 0,2 % de son PIB à son système judiciaire, quand la moyenne européenne s’est élevée à 72 € par habitant et 0,33 % du PIB. Sur 1 000 € de dépenses publiques, seuls 4 euros sont dédiés à la Justice. Pour 2021, sur un budget national de 883 milliards d’euros, seuls 12,8 sont affectés à la Justice, soit 1,4 % du budget du pays (13,25 milliards si on y ajoute les 450 millions consacrés à la Justice Administrative, programme 165- budget du Conseil d’Etat).

La hausse annoncée du budget de 8 % en 2022 par le Gouvernement est absorbée par l’administration pénitentiaire et le recrutement de 400 magistrats. Cela suffit à peine à combler les postes non pourvus et les départs en retraite.

L’Union Syndicale des Magistrats a dressé un bilan complet de la situation en novembre 2021 : “Observations de l’USM sur le projet de loi de finances 2022“. Dans une note datée du 2 février 2022, le Syndicat National de la Magistrature a lui aussi dressé un constat sévère de la situation (moyens dans la justice entre insuffisance et gâchis).

Nouvelle Donne propose donc de :

  • Planifier le recrutement de magistrats et de personnels de Justice à hauteur de 1 milliard d’euros sur la durée du quinquennat afin de recruter 4 500 juges et 6 000 personnels de justice titulaires (la Conférence Nationale des Présidents des Tribunaux et Cours d’appel estime les besoins à 2 200 alors que le Syndicat de la Magistrature estime qu’il faudrait doubler le nombre de juges pour atteindre la moyenne européenne). 
  • Augmenter les capacités de formation de l’Ecole Nationale de la Magistrature.

  • Développer les soins psychiatriques en prison pour préparer au mieux la réinsertion des détenus après leur sortie d’une part, et pour prévenir les violences au sein des établissements pénitentiaires d’autre part.
  • Élaborer un référentiel de la charge de travail. Faute d’outil existant et pour répondre au mieux aux besoins, mais aussi pour prévenir le burn out et le mal être au travail, un référentiel de mesure de la charge de travail sera créé en partenariat avec les organisations syndicales